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L'Électricté pour se Soigner

À Charge de Revanche

LE MONDE DES SCIENCES N°8 > Avril-Mai > 2013

L'Électricité peut Détruire les Cellules Cancéreuses

Détruire des cellules tumorales par l'électricité tout en préservant les tissus environnants, c'est possible, et c'est ce qu'on appelle "l'électroporation irréversible".

Il s'agit d'appliquer de très courtes décharges électriques successivement à différents endroits de la tumeur grâce à des électrodes. La structure de la paroi des cellules se désorganise. Conséquence, des trous se forment par lesquels les cellules se vident de leur contenu, puis meurent. Depuis les années 60, l'électroporation est utilisée régulièrement pour faire pénétrer de l'ADN dans des bactéries. Mais, dans ce cas, les bactéries survivent car les trous sont transitoires. L'équipe de Rafael Davalos (université Virginia Tech), associée à Lluis Mir (Institut Gustave-Roussy de Villejuif), a eu l'idée de détourner la technique en augmentant l'intensité du traitement électrique. Ainsi, les trous pratiqués dans la membrane ne se referment plus.

Les avantages ? Le traitement dure une minute et son efficacité peut être suivie en temps réel par tomographie. Les premiers essais sur des tumeurs de prostate auront lieu début 2008.

E.N. - SCIENCE & VIE > Septembre > 2007

De l'Électricité pour Cicatriser à toute Vitesse

Doper la cicatrisation d'une plaie juste en faisant varier l'intensité d'un courant à la surface de la peau : tel est l'exploit d'un chercheur d'Aberdeen... grâce à un physiologiste du XIXème siècle !

Lorsque Min Zhao, spécialiste de la cicatrisation à l'université d'Aberdeen (Ecosse), tombe, début 2004, sur les écrits d'Emil Du Bois-Reymond, un physiologiste allemand du XIXème siècle, il ne sait pas encore qu'il a entre les mains une piste révolutionnaire pour soigner les plaies les plus graves, les aider à se refermer plus vite et mieux. Cela fait pourtant des années que le chercheur tente de comprendre les rouages de la réparation de la peau. En particulier, il s'intéresse à la "migration cellulaire", qui voit des cellules intactes de la peau se diriger vers la blessure. Un phénomène si bien orchestré qu'il est cousidéré comme l'un des piliers de la cicatrisation. Depuis les années 80, les biologistes sont panenus à identifier les grandes réactions biochimiques qui provoquent cette migration des cellules. Oui, mais le signal initial, celui qui déclenche le processus, continue de leur échapper. Par quelle force les cellules sont-elles guidées vers la plaie ? Mystère. La question est pourtant primordiale, puisqu'identifier cette force équivaudrait à maîtriser le processus de reparation ! Et justement, c'est cette énigme que Min Zhao vient en grande partie d'élucider. Et ce sont les écrits de son illustre prédécesseur allemand qui l'ont mis sur la voie : ladite force est... un courant électrique, comme le décrivit Emil Du Bois-Reymond, mais sans en tirer d'enseignements à l'époque.

UN ESPOIR INATTENDU... En fait, Min Zhao vient de démontrer que ce courant est non seulement autogénéré par les cellules endommagées dans la plaie, mais que c'est lui qui indique la direction à suivre pour les cellules réparatrices. Mieux, le chercheur a pu accélérer et ralentir le rythme de la cicatrisation en modifiant l'intensité de ce courant. C'est la première fois que l'action curative de l'électricité sur les blessures est prouvée. L'espoir thérapeutique est aussi immense qu'inattendu.
Rien n'aurait toutefois été possible sans ces improbables observations réalisées en 1843 dans une petite chambre berlinoise transformée en laboratoire. Emil Du Bois-Reymond y mène des expériences sur l'électricité, l'une des grandes découvertes du siècle. Ses travaux portent alors sur certaines espèces de poissons, comme la torpille, dont le corps est parcouru de courants électriques. Et s'il en était de même chez l'homme ? Pour en avoir le coeur net, le jeune savant élabore un système, basé sur des électrodes plongées dans un liquide conducteur dans lequel il immerge ses mains. Et découvre qu'un courant semble bien traverser la peau humaine. Sur sa lancée, il pratique alors de petites incisions sur l'un de ses doigts. Et surprise, observe qu'au niveau des coupures s'applique un courant électrique sensiblement différent de celui qui parcourt la peau intacte. Quel rôle joue ce courant particulier ? Pas l'ombre d'une explication. Et pendant 150 ans, le fait qu'un courant soit généré par les plaies cutanées va peu à peu sombrer dans l'oubli... Jusqu'à ce que Min Zhao tombe sur un exemplaire oublié des publications de Du Bois-Reymond. Je l'ai d'abord lu d'un oeil amusé, raconte-t-il aujourd'hui. Puis je me suis dit que personne n'avait emprunté cette piste depuis un siècle et demi et qu'elle pouvait finalement bien mener quelque part". Première étape : mesurer finement le courant dans les plaies... et comprendre comment il apparaît.

Nous ne sommes pas tous égaux devant la cicatrisation. Certaines plaies sont particulièrement diffici les à réparer, notamment chez les personnes atteintes de diabète. Mais d'autres facteurs comme le tabagisme ou encore l'obésité peuvent être mis en cause, tout comme les traitements par corticoïdes. Certains endroits également cicatrisent moins bien que d'autres. C'est le cas du centre de la poitrine, du dos et des articulations. Une méthode capable de maîtriser le mouvement des cellules chargées de réparer la peau est donc très attendue.

"LA PEAU FONCTIONNE UN PEU COMME UNE BATTERIE". La peau fonctionne un peu comme une batterie, explique Josef Penninger, directeur de l'institut de biologie moléculaire de Vienne, et membre de l'équipe internationale venue prêter main-forte à Min Zhao. En permanence, les cellules font passer au travers de leur membrane des ions chargés positivement ou négativement ce qui provoque l'apparition d'un potentiel électrique. Il s'agit d'un processus commun à toutes les cellules dlu corps humain, et qui est connu depuis des décennies. Or, en détériorant les cellules de la peau, la plaie provoque une sorte de court-circuit, qui déclenche l'apparition d'un courant électrique orienté selon une direction définie". Grâce à de mini-électrodes plantées directement dans les cellules d'échantillons de peau humaine et animale, la différence de potentiel à pu être estimée : entre 42 et 100 millivolts par millimètre. "Il s'agit d'un courant local limité à une zone de 1 ou 2 millimètres au bord de la plaie", précise Josef Penninger.
Deuxième étape vérifier si ce courant guide les cellules. Aussitôt dit, aussitôt fait sur de la peau humaine en culture, les chercheurs pratiquent une petite incision, puis appliquent, encore à l'aide d'électrodes, un courant polarisé dans le sens inverse de la cicatrisation. Le résultat est stupéfiant : non seulement la plaie ne se referme pas, mais elle s'ouvre ! Et il suffit d'appliquer un courant dans l'autre sens pour inverser la tendance. Nous avons même réussi à influencer le rythme de la fermeture, poursuit Min Zhao. La vitesse atteint son maximum lorsque la tension du courant se situe entre 100 et 200 millivolts par milliètre". Ce n'est pas tout. Des substances appliquées directement sur la plaie (comme le nitrate d'argent) augmentent la circulation d'ions et donc la tensio, du champ électrique et accèlérent la guérison. lnversement, l'application de substances inhibitrices du flux ionique (tel le furosémide) diminue le champ électrique de la plaie et compromet la guérison. De surprenantes observations, valables in vitro comme in vivo chez l'animal !

C.T. - SCIENCE & VIE > Février > 2007

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